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Affichage des articles du décembre, 2022

night snack

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j’espère que tu sais à quel point je te vois quand tu vas jouer loin de ton sommeil ne va pas t’imaginer que je crois rêver quand le fil de tôle astral – il ne restait plus d’argent pour nos petites âmes tard venues – remue à côté de moi comme si la truite exténuée sous le glitter à tes paupières – et cette éternité entre les secousses – refusait de lâcher prise je te vois tellement retourner scéner (loin des regards et de conversations qui te pesaient même à Précieux-Sang) toute seule au frais dans la cuisine d’été comme s’il restait un lieu pour préserver les fraises des champs pour rebrasser la crème le sucre les blancs d’œufs le temps que fige toute la douceur perdue du monde je te vois redescendre la mousse aux lèvres puis te rendormir sous cette constellation clairsemée or et rose – le denier party remonte à quand déjà ? – où je tiendrai peut-être longtemps  à lire un peu d’avenir pour notre peu d’espoir Hilma af Klint,  Group IX/UW, The Dove , no....

Là où les chemins ne se croisent pas

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Tu avais insisté pour stationner l’auto sur la rue Gauthier. On allait pouvoir se rendre au fleuve en descendant le sentier qui traversait l’ancienne terre de ton grand-père. Tu l’avais fait souvent quand tu étais petite. Je t’avais montré la carte. Le boulevard Bécancour longeait le littoral jusqu’à Nicolet. On allait forcément le croiser. Selon toi c’était la carte qui se trompait. Je t’ai suivie de mauvaise humeur. Et toi comme une enfant tu as souri tout le long du chemin. Souri en me montrant la ruine rouillée du vieux tracteur sur lequel ton genou s’était égratigné (et qui attendait toujours trente ans plus tard d’être « envoyé à la scrap »). Souri encore en te mouillant le pied pour passer le ruisseau où l’on t’avait retrouvée évanouie, la tête saignant sur un galet, lovée contre la masse noire et affalée d’une génisse morte. Souri de plus belle en me signalant la bouse où je m’en allais piler et qui ressemblait « exactement » à celle si bien garnie de ces champignons q...

échappée belle au bout du fleuve

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Toute forme en friche ou en troupeau, emmitouflés comme des pauvres dans leur sommeil mal rapiécé – « non, ce n’était pas nous », espérerait-on souvent et perméables malgré l’adjuration – nous guettions la goutte d’huile ou le grain d’or chacun sur son petit bout de berge, sans oser le noir là-outre (encore qu’à peine) où l’avenir rongeait son frein. La profondeur n’étant alors qu’une touche froide au fond des trous dans nos sabots, c’était la seule séparation sur terre. Le seul mystère. Nos cœurs – caries de chairs et précipices nerveux – devinaient-ils ce que noyaient la bourbe, le flot figé ? On dit que la vie est bien de chez nous... Si ce Saint-Laurent-des-rêves-et-levures demeurait ainsi étang, c’était par la seule force des trêves qui s’ignorent. Mais une portée remuait dans la retenue (derrière l’acné) des temps, âpre et morale comme une constellation. J’écris ici pour révéler que c’est encore toi qu’on relâcha. Que happée par la bordure du monde, c’est toi qui découvris l’espa...