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Affichage des articles du juin, 2022

grippe aviaire

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on a fini par s’embarquer dans le noir vaste et péremptoire qui venait de s’immobiliser devant nous en dégoisant le poids sans fond de son accablement (une quinte de sol toussée un bon deux pieds à gauche de notre piano désaccordé)  c’était un ton beaucoup trop grave pour nos deux têtes de linottes ce qui fait qu’on a eu la chance de se laisser engloutir sans avoir peur de se perdre (ou de découvrir à la toute fin qui on avait vraiment été dans les caches de nos hontes) on s’est quand même tenus par la main pour se ravitailler un peu les cœurs (on est jumeaux par le cordon toi et moi et l’ombilic nous tient depuis tellement loin que je peux parfois t’entendre pleurer dans le sifflement des conques)  on a touché une dernière fois pendant que les chairs de poule de notre amour sans queue ni tête caquetaient de plus en plus effarouchées sur le seuil de l'anéantissement  on ne sait jamais où on s’en va c’est ce qu'a choulé ma plaque d’eczéma (celle qui n’existe que pour t...

stations

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on a manqué le dernier métro de trois ans on s’est quand même assis en attendant que rien ne vienne récupérer nos deux flèches perdues sur la carte il n’y aura plus de visage dans la foule plus de pétale sur la branche noire et mouillée l’arbre s’est fait pore il a recraché l’écorce par la peau il renâcle et se débite il redevient grume vive laisse s’évaporer ses cercles de croissance il s’offre à l’atmosphère réenracine son or sa pulpe au-dessus de la noyade ou de l’électrocution dans le ronflement des tunnels je te demande si le courant passe toujours entre nous deux     tu me dis qu’il grésille sous le bleu des eaux que notre amour aussi est bleu comme l’ozone qu’il nous protège encore de loin  – puis  tu  regardes convulser les cernes derrière les vieilles affiches tu dis qu'une écriture tente de revivre words of the prophets  on the subway walls ces mots j’aurais besoin que tu me les lises je ne vois plus clair je ne reconnais plus ...

l'énigme

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une vie un peu folle a repris dans le sous-sol montréalais on était descendus se mettre à l’abri du gris luisant des pluies de juin on s’ennuyait aussi de la force de nos bras quand le vent pousse sur les portes du métro Beaubien sauf que l’odeur de béton chaud et de pneu graissé s’était retirée tout sentait vert comme un souvenir d’enfance : on s’est tout de suite rappelé des arrivées à la maison qui filtraient dans l’auto après les longs voyages des nuits d’été qui nous avaient appris à arriver en ville comme dans un rêve sous la magie blanche des lampadaires (depuis plus loin que nous c’est un pouvoir qui nous unit : ces mêmes souvenirs vécus à une telle distance l'un de l'autre) c’est en redescendant l’escalier éteint (même vertige encore : perdre pied de ne plus se sentir transporté) c’est en éprouvant sous nos plantes nues le frais des mousses qui transpirait dans le creux inoxydable des marches qu’on l’a réalisé      ...